Le temps de l’imposture : Ou Le roman de Tito
suivi de La roue épique de Dobritsa Tchossitch par Georges Nivat
traduit du serbe par Vladimir André Cejovic
375p.,
Josip Broz Tito, le champion des non-alignés, l’inventeur du concept d’ « autogestion » encensé par la tendance progressiste, l’homme qui a osé tenir tête à Staline… Mais qu’en est-il en vérité? Comment cet officier autrichien de la Première Guerre mondiale, puis agent du Komintern, a-t-il pu prendre possession d’un pays entier, avant de gagner le monde à sa gloire?
De nombreux écrivains ont fait le procès du communisme: Soljenitsyne, Chalamov, Zinoviev, Grossman, Koestler et tant d’autres. Ils en ont dressé un portrait impitoyable, disséqué son fonctionnement, dénoncé ses travers. Mais c’est la première fois, dans la littérature, que cette idéologie inhumaine, cette imposture sans mesure s’incarne dans un personnage qui donne une image complémentaire de la duplicité de ce système totalitaire du XXè siècle.
A la fin de la Deuxième Guerre mondiale, soutenu par les Alliés et par Moscou, Tito s’empare de la Yougoslavie. Les communistes remportent la victoire, et s’appliquent à remodeler la société, voulant transformer un pays arriéré en un pays industriel et moderne: emprisonnement, liquidations, confiscations de biens… Dans ce contexte, Dušan Katić, le héros du Temps de l’imposture, fils de paysan, résistant, puis ministre intransigeant et radical, prend conscience peu à peu que le « socialisme à visage humain » n’est peut-être qu’une vaste tromperie portée par un homme redoutable, un satrape épris de luxe en même temps qu’un animal politique à l’instinct infaillible, voyant dans les Serbes la menace majeure contre son pouvoir. La crise existentielle de Katić commence en 1948, lorsqu’il découvre que Tito envoie ses adversaires politiques fidèles à Staline sur Goli Otok (l’Île nue) d’où ils reviennent torturés et brisés, s’ils ont la chance de survivre. Les limogeages et les procès arbitraires se succèdent à la cour du monarque. Et cette crise durera jusqu’à la fin des années 1970, lorsque Dušan Katić sera banni. Pendant tout ce zemps, l’ « héritier » sera hanté par le personnage de Brutus, mais, toujours fasciné, n’osera pas porter la main sur le tyran. La mort en 1980 de Tito, qui avait arbitrairiement dessiné les républilques yougoslaves, provoquera la dissolution violente du pays dont les guerres intestines ensangleteront l’Europe à la fin du XXe siècle.
Le temps de l’imposture clôt cette saga immense qui, depuis la fin du XIXè siècle, suit la famille Katić à travers l’histoire de la Serbie et des Balkans. Racines, Le Temps de la Mort, Le Temps du Mal où naît le fanatisme rouge qui imprègne le roman présent, Le temps du Pouvoir et Le Temps de l’imposture représentent la plus grande entreprise littéraire, et Dobritsa Tchossitch, avec Ivo Andritch et Milos Tsernianski, le plus grand écrivain serbe du XXè siècle.
« Les trompettes sonnent, les sceaux de l’histoire sont brisés, le cheval blème descend du ciel sur cet ancien petit paradis terrestre qu’était Prerovo, Prerovo le bourg assoupi, odorant, oriental et homérique, la racine de toutes les Serbies du dernier romancier épique de l’Europe, Dobritsa Tchossitch.» Geroges Nivat (postface)