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Traduit du serbe par Dejan M. Babic
Andjelko Krstic (1871-1952) était l’écrivain de la pecalba, de l’émigration économique temporaire que de nombreux Serbes de Macédoine durent pratiquer sous l’occupation ottomane. Écrivain réaliste, attaché à décrire les humbles travailleurs de sa région natale, il fut mis au ban par les communistes pour avoir peint la situation dans laquelle vivait la raïa sous les musulmans, mais surtout pour avoir été un grand écrivain chrétien. Dans son roman et ses nouvelles, le christianisme est celui des petites gens, présent dans la vie quotidienne, pratiqué dans les gestes de tous les jours, et se réalisant dans le travail. Son univers n’est pas celui du gazda, chef de famille et maître de maison, décrit par Borisav Stankovic, l’autre grand écrivain du sud de la Serbie. C’est le peuple, ici, qui par son activité modeste et constante s’oppose à la colonisation ottomane.
Le regard que Krstic pose sur ces Serbes, mais également sur ces Turcs miséreux, est celui de Dieu : bienveillant et miséricordieux. Et les personnages de ces nouvelles, tout comme le peuple qui vivait dans ces régions indomptables à cette époque-là, répondent à sa compassion : leurs actes sont une liturgie permanente à la gloire du Créateur. « Vivant et travaillant au milieu de durs et impitoyables possédants, de métayers humiliés et opprimés, de pecalbars travailleurs et patriotes, de petits-bourgeois très malléables, là où des intérêts étrangers s’exprimaient et s’imposaient, je me suis efforcé, bien qu’étant éloigné des centres culturels et des académies, de saisir et de décrire les multiples facettes de la vie réelle de ce milieu. » Ces mots de l’auteur paraissent modestes par rapport à la grandeur de son œuvre. Poétique avant tout, elle transcende la simple volonté de description pour devenir un phénomène unique dans la littérature.
A l’exemple de ses nouvelles, Trajan, son unique roman, représente pour nombre d’émigrés la Bible des personnes déplacées.